De Bagnara Calabra à Alicudi

Bagna Calabra n'a rien d'un bagne calabrais. C'est un mignon petit port de pêche - avec ce jour-là deux embarcations spécialement équipées pour la chasse à l'espadon : mât de 20m de haut avec poste de vigie sous parasol et proue prolongée également de 20m pour le poste de harponneur. Ici, à l'aplomb des "Aspromonte" anciennement étagées en terrasse vertigineuses mais cultivables, notre séjour coûtera 20 euros. Nous sommes au plus bas de l'échelle des prix estivaux, dans cette côte Calabraise avec chaleur de braise. Plagette pour méduses, pour la 1ère fois cette année. Enorme pizzéria sous un hangar avec peut-être 500 couverts (c'était complet… mais les clients, d'où viennent-ils ?)

Scylla sera notre point de rencontre avec Diane et Miles, venus de Rome par le train et au final avec un taxi clandestin. Il y a une forte ressemblance ici avec les Cinqueterre, les barques sont remontées à l'aide de treuils à tous les coins des maisons. Nous sommes invités dans un fine trattoria de poisson par nos deux nouveaux équipiers..

Traversée très dure par F5 avec rafales à F6 plein pif. En arrivant sur Vulcano, le clapot devient monstrueusement désordonné (il y a des pointes à 35nd) et il faudra persévérer jusqu'au fond de Porto di Levante pour prendre un mouillage au calme. Nos invités vont direct à la nage jusqu'au bassin balisé des boues acides et fumerollantes. Les collier et bracelet d'argent dont Diane ne se sépare pas au bain ont viré irrémédiablement au noir!

En pénétrant dans l'île à pieds en quinze minutes on découvre la côte ouest (Porto di Ponante) plage noire et tumulte des flots qui viennent s'y briser dans un coucher de soleil hautement dramatique. Tout cela les pieds au sec dans une guiguette sympathique à 20cm au-dessus des vagues. C'est la Bretagne moins les marées et le caban!

Route tranquille vers Salina. En longeant Lipari par l'est nous pouvons voir les anciennes mines et manufactures de pierre ponce

Santa Marina de Salina est une bien jolie station touristique dans un bourg dont les palais montrent une ancienne richesse locale. Diane et Miles, bons marcheurs s'y baladent longuement, nous brièvement, il y avait des petits boulots de maintenance à bord.

Direction Filicudi, nous nous éloignons du tourisme de masse!

Ici à Filiduci, on deviendrait rapidement îl-luminé : une courte voie longe la mer et tient lieu de corso. Devant le café s'agglutinent tous les rendez-vous du soir. L'éloignement commence à nous prendre la tête, nous divaguons dans les ruelles avec une certaine ivresse, avant l'apéro, donc inutile de nous décrire après!

Nos ami sont restés sur l'île, nous devons partir chercher la 2ème paire, Alexis et Axelle en Sicile. Traversée dans l'autre sens donc, nous visons le port de Capo d'Orlando. A la dernière minute je décide pour un mouillage à l'abri du cap devant une petite plage au pied de pentes boisée. Devant nous trône un hôtel ancien en espalier : c'est celui où Dagi travaillait il y a … 37 ans et qu'elle n'espérait même plus retrouver!

C'est à Cefalù que nous embarquons nos amis, venus en avion à Palerme.

La Gd-voile ne sort plus bien de son enrouleur, je crains ensuite de devoir grimper au mât pour la débloquer. Cela s'ajoute à la liste noire des pépins divers : la drisse de l'enrouleur du genoa qui elle, sort de son emmagasineur, l'annexe qui se dégonfle et prends l'eau, le hors-bord qui s'étouffe, le réservoir d'eau douce qui fuit, la télécommande du guindeau qui fait faux contact... Bon, des bricoles, pour nous rappeler qu'un bateau à voile ne fonctionne pas uniquement à la poésie pure...

Nous laissons Cefalù à son déchainement touristique. Dagi y achète une barque de 12cm. Au fond dans l'ombre d'une salle lumineuse d'exposition de photos et peintures inexistantes je trouve un carton de tapisserie fin  XVIIIèm remarquable.

C'est reparti pour les îles, Alicudi en tête. Voilà encore un endroit pour poser son sac. C'est comme Filicudi, mais avec un coefficient de "plus d'insularité" très sensible : pas de voitures, tout se transporte à dos de mulets. Le café des rendez-vous du soir est encore plus extravagant, il semblerai que tous les habitants descendent les longues marches de pierre pour s'y resserrer tout autant dedans que dehors dans la rue qui borde la mer. Population hétéroclite où les bobos français et italiens rivalisent d'originalité. Des touristes habillés en touristes et plein de babas de tous âges, quelques locaux, des clodos du soleil et même un qui dort devant la courte plage dans une tente Himalaya.